Je donnerais volontiers ma pièce à un théâtre vide, sans directeur, sans acteurs, sans public, et sans presse.
Une répétition générale est toujours un supplice.
Quoi! Ce monsieur à qui je ne trouve aucun talent va peut-être dire que j'en ai?
Le plus bel éloge ne fait pas plus plaisir qu'une banale politesse, et toute critique me paraît une grossièreté.
On s'habitue vite au silence des journaux.
Dans l'analyse de la pièce d'un autre, je ne reconnais jamais la pièce que j'ai vue moi-même. Pourquoi la critique serait-elle plus raisonnable quand il s'agit de moi?
Un article de M. Faguet amuse ou ennuie, mais quel rapport a-t-il avec la justice littéraire? Il y a trois ou quatre critiques de talent, mais, le reste, pouah!
Je ne sais pas ce que c'est qu'une maison de commerce, mais je sais bien que le théâtre est l'endroit où l'on parle le plus d'argent. Je ne connais qu'un directeur qui ait le courage de maintenir sur l'affiche une pièce qui ne fait pas d'argent, et, encore, je ne veux pas le nommer: il me ferait un procès.
Un directeur a ce droit: il n'en usera jamais.
Un auteur, s'il a une âme de poète, ou de sage, peut se passer de réclame, mais un directeur, un acteur, une actrice! Essayez, même pour une reprise, de ne pas convoquer la presse!
Et puis, ne nous lassons pas de le répéter: directeurs, acteurs , auteurs, c'est un monde d'aimables fous.
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