C'est du fin fond de pareille misère que Wilde dut accomplir, pendant tout le premier moi de cette période d'emprisonnement, le plus éprouvant de ses travaux forcés: le treadmill, ou "moulin de discipline", énorme roue de bois que le détenu, debout à l'intérieur, était obligé de faire tourner continuellement, six heures par jour, en actionnant, à l'aide de ses pieds nus, des palettes mobiles. Ce dispositif barbare, proche de l'instrument de torture, sir Edward Clarke, l'avocat de Wilde, le décrivit comme suit:
"Figurez-vous une immense roue à l'intérieur de laquelle se trouvent des marches circulaires. Oscar Wilde, placé sur une des marches, fait mouvoir aussitôt la roue à l'aide de ses pieds. Les marches se succèdent sous son pas à un rythme rapide et régulier. Ses jambes sont soumises à un mouvement précipité qui produit une fatigue énervante et affolante au bout de quelques minutes. Mais il doit maîtriser cette fatigue, cet énervement, cette souffrance, et il lui faut continuer à jouer des jambes sous peine d'être renversé, enlevé et projeté par l'action même de la roue. Cet exercice fantastique dure un quart d'heure. On donne à Wilde cinq minutes de repos. Puis l'exercice recommence pour une durée totale de six heures."
(Daniel Salvatore Schiffer, Oscar Wilde, splendeur et misère d'un dandy, Éditions de La Martinière, 2014, p. 164)
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