Il nous vient souvent l'envie de changer notre famille naturelle contre une famille littéraire de notre choix, afin de pouvoir dire à tel auteur d'une page touchante: "frère".
BLOG AMOUREUX DE JULES RENARD
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vendredi 31 octobre 2014
jeudi 30 octobre 2014
Journal du 30 octobre 1887
Il y a des moments où l'on en veut à mort à toutes les jeunes filles qu'on rencontre, parce qu'elles ne vous jettent pas leur coeur et 20 000 livres de rente.
Jules Renard vu par André Rouveyre
Ses écrits [de Paul Léautaud] de mémorialistes sont à l'opposé de ceux des Goncourt, tellement plus à superficie de tout intérêt aux lettres, et tellement loin d'être trempés de la vivante humanité qui anime les siens. Le contraire aussi de ceux de Jules Renard, cet entêté morose, et qui tint si curieusement et si bien boutique de sa bile.
(André Rouveyre, Choix de pages de Paul Leautaud, Éditions du Bélier, 1946, p. 208.)
(André Rouveyre, Choix de pages de Paul Leautaud, Éditions du Bélier, 1946, p. 208.)
mercredi 29 octobre 2014
Journal du 29 octobre 1895
La grande erreur de la justice, c'est de s'imaginer que ses accusés agissent toujours logiquement.
Intermède
Bonheur de Proust. À chaque lecture, on ne saute pas les mêmes passages.
(Roland Barthes, cité par Isabelle Rüf, Le Temps (Genève), samedi culturel, 16 août 2014, p. 36)
mardi 28 octobre 2014
Dédicace inédite de Jules Renard
Envoi sur un exemplaire de Poil de Carotte, Ernest Flammarion, 1894
N°2
À Mme J. Marni, que je me décide à lire.
Tiens! Tiens!
Hommage d'étonnement littéraire.
Jules Renard
N°2
À Mme J. Marni, que je me décide à lire.
Tiens! Tiens!
Hommage d'étonnement littéraire.
Jules Renard
(Source vente Alde SVV du 16 octobre 2014)
lundi 27 octobre 2014
Lettre inédite de Jules Renard
44 rue du Rocher, Paris XVIII° 23 octobre 1909
À X.
Cher ami,
Crime de village, est épuisé (épuisé par quoi?)
Mon lecteur trouvera Sourires pincés chez "Ollendorf"
Je dois aussi chercher Palladium car on ne le trouve pas dans ma bibliothèque.
Votre dévoué, Jules Renard
(Source: vente Alde SVV, vente du 16-10-2014.
dimanche 26 octobre 2014
Journal du 26 octobre 1893
Goncourt et Pottecher passent ensemble une saison à Vichy. Quand ils se quittent, Goncourt, par peur de l'ennui, effroi de la solitude, embrasse son jeune ami et pleure.
Dès que Pottecher suppose que Goncourt est revenu à Paris, il va le voir. Il trouve un homme de marbre, veiné de rouge, qui met longtemps à fondre, qui ne redevient qu'au dessert l'homme de Vichy.
samedi 25 octobre 2014
Journal du 25 octobre 1895
Papa, type de maire. - Le tambour de la commune a 25 francs par an.
- Il n'a pas de quoi entretenir sa caisse, dis-je.
- D'abord, elle n'est pas à lui. Elle est à la commune; et puis,je ne la fais jamais battre. Il ne tape guère qu'aux élections. En admettant que je le dérange une heure par an, ça lui fait une heure bien payée. Enfin, c'est un privilège. Le tambour revient presque de droit au garde-champêtre, que mon prédécesseur a dépossédé je ne sais pourquoi. C'est un type ce tambour. Pour scier ma pile de bois, il est venu l'autre jour avec son couteau à scie.
chaque commune a maintenant son assistance médicale
vendredi 24 octobre 2014
Actualité théâtrale
Salomé d'Oscar Wilde
Adaptation et mise en scène Hazem El Awadly. Par la troupe du Théâtre Nout.
Adaptation et mise en scène Hazem El Awadly. Par la troupe du Théâtre Nout.
Oscar Wilde nous emmène dans un monde de débauche et de meurtre, orchestré par une femme dont la sexualité n'est qu'un jeu de pouvoir et d'amour contre toutes les mœurs. (Durée 1h20);
Théâtre Nout, Île-Saint-Denis 93.
Du 23 octobre au 28 décembre 2014.
jeudi 23 octobre 2014
Journal du 23 octobre 1908
Elle m'apporte son livre. Une petite femme vieillotte, américaine, bavarde, et pourtant timide, car sa voix tremble. Elémir Bourges lui a bien recommandé de m'apporter un exemplaire corrigé. Elle souffre d'une faute d’impression. Elle n'espère pas avoir le Prix cette année, mais plus tard. Elle aimait et admirait tant Goncourt! Elle voudrait être couronnée un peu par lui à travers nous. Dans sa dédicace elle m'offre avec crainte du rêve, des pleurs, du sang. Pauvre petite jeune vieille!
mercredi 22 octobre 2014
Journal du 22 octobre 1896
Comme préface, se mettre devant la glace, tirer son âme au jour et faire son portrait. Intituler ça Ma Psyché et en faire un livre à 4 francs pour le Mercure de France.
Ma Psyché. - Eh! bien, non! Je n'aime pas ma femme. Je n'aime pas mes enfants. Je n'aime que moi. Il m'arrive de me demander: "A leur mort, qu'est-ce que j'éprouverai?" Et je n'éprouve rien, du moins par avance, rien, rien.
mardi 21 octobre 2014
Journal du 21 octobre 1889
Il y a des gens qui donnent un conseil comme on donne un coup de poing. On en saigne un peu, et on riposte en ne les suivant pas.
Intermède - Naissance d'un poète
Des Mots
Des mots pour toi, des mots pour moiPrend les, avale les, mange les, cuis les,
Aime les, apprends les, connais les,
Regarde-les, invente les, prends les,
Crache-les, englouti les, lave les,
Découpe les, cri les, dis les,
Écrie les, améliore les,
Juste joue avec ces mots trop rigolos.
Edouard Jordan, 9 ans, octobre 2014.
lundi 20 octobre 2014
Journal du 20 octobre 1902
Treize jours. Pauvres capitaines dont la seule joie intellectuelle est d'accorder des sursis à des gens de théâtre et de lettres!
- Quel motif invoquez-vous pour demander un sursis? dit le gendarme.
- Je fais jouer une pièce de théâtre dont il fait que je surveille les répétitions.
- Bien. Quel est votre métier?
Actualité littéraire
Proust écrivain de
la Première Guerre mondiale, sous la direction de
Philippe Chardin et Nathalie Mauriac Dyer
avec la collaboration de Yuji Murakami.
192 p.
15 x 23 cm.
20 €
2014, Éditions universitaires de Dijon
dimanche 19 octobre 2014
Journal du 19 octobre 1906
Le bonheur, c'est d'être heureux; ce n'est pas de faire croire aux autres qu'on l'est.
samedi 18 octobre 2014
Journal du 18 octobre 1904
Flammarion tire le pied sur le trottoir boueux.
- Non, ça ne va pas, dit-il.
- A la campagne?
- Je suis resté à Paris.
- Pour travailler?
- Toujours, et puis, je suis fâché avec mon gendre . Oh! j'ai bien vieilli. La vie me dégoûte.
- Voyons! dis-je.
- Si! Si! Et vous, qu'est-ce que vous faites?
- Ma foi, rien.
- J'ai lu votre interview. Vous n'avez rien dit. Au revoir.
Pourquoi ne se désolerait-il pas? Il est bien libre!
Et, sur le boulevard, le même Montégut, celui qui est en train de faire un roman "immense".
- Non, ça ne va pas, dit-il.
- A la campagne?
- Je suis resté à Paris.
- Pour travailler?
- Toujours, et puis, je suis fâché avec mon gendre . Oh! j'ai bien vieilli. La vie me dégoûte.
- Voyons! dis-je.
- Si! Si! Et vous, qu'est-ce que vous faites?
- Ma foi, rien.
- J'ai lu votre interview. Vous n'avez rien dit. Au revoir.
Pourquoi ne se désolerait-il pas? Il est bien libre!
Et, sur le boulevard, le même Montégut, celui qui est en train de faire un roman "immense".
vendredi 17 octobre 2014
Journal du 17 octobre 1893
Je crois que, voulant faire un chapeau, tu n'as réussi qu'un abat-jour. A présent, mets-le sur la lampe, sur le verre de la lampe. Il me semble que je jugerai mieux de l'effet.
Actualité théâtrale
Théâtre de Nesles
« J’ai encore quelque chose à
dire : Sacha Guitry !»
Un one man show consacré à l’une des plus belles figures de la scène au XXeme siècle, où
les bons mots pétillent, amusants, lucides, drôles, grinçants parfois, emblématiques
toujours, d’une passion pour la vie, le théâtre, l’élégance et l’esprit français,
Sans oublier, bien sûr, sa passion pour les femmes !...
Spectacle conçu et écrit par moi,
mis en scène par : toujours moi,
interprété par : encore moi,
alias Pierre-André HELENE
Les mardi et mercredi 25 et 26 novembre, 2 et 3, 9 et 10 décembre
2014 à 19h15
Théâtre de NESLE 8 rue de Nesle 75006 Paris
Réservation : 01 46 34 61 04 Tarif :25€-20€
jeudi 16 octobre 2014
Actualité culturelle
Le Mythe des Courtisanes
Exposition
Vendredi 7 novembre 2014 – dimanche 29 mars 2015
Portraits - Photos – Caricatures - Bijoux- Exceptionnelles robes du soir présentés dans un authentique décor Art Nouveau.
Découvrez l’histoire extraordinaire de celles qui ont symbolisé en leur temps la beauté,
le chic, le luxe, l’amour et le scandale. Des demoiselles d’opéra de la fin du XVIIIème siècle aux grandes courtisanes de la Belle Époque, c’est un monde de glamour souvent
tragique qui s’offre à vous.
Nous les évoquerons jusqu’à nos jours, dans leurs étonnantes
reconversions modernes.
Visite en français tous les jours – sauf lundi et mardi - à 15h15.
Tarif 15 €. Durée : une heure quinze. Il n’est pas nécessaire de réserver.
Musée Maxim’s. 3 rue Royale 75008 Paris. 0142653047
mercredi 15 octobre 2014
L'automobile au temps de Jules Renard
En 1900, on n'achète une automobile que pour se donner du standing. Sa possession, comme celle d'un cheval de course, vous distingue du commune des mortels. Cela vaut bien de verser à la commande un acompte d'un tiers du prix et d’attendre la livraison près d'un an. Quand l'auto est enfin prête, la garantie est subordonnée à un apprentissage de plusieurs jours. Le client, disons plutôt l'amateur, comme pour une œuvre d'art, doit l'effectuer aux usines ou chez le représentant de la marque.
Pour démarrer, on tourne la manivelle, et souvent la voiture reste immobile. On tourne, on tourne, jusqu'à ce que la tête vous tourne. alors, on se met à deux, on appelle un domestique. Tandis qu'il tourne à son tour, on ouvre et on ferme le volet d'air. Un peu plus ou un peu moins. Tout à coup, une explosion lance la manivelle à contresens sur le bras du domestique.
- Aïe!
- Ce n'est rien. Courage, dit-on, le moteur a parlé!
Le conducteur est souvent un chauffeur de maître. Avant de partir, il réchauffe le moteur avec du carburant enflammé. En cours de route, il doit souvent changer de vitesse, régler l'avance à l'allumage, surveiller le graissage et même refroidir les pneus qui ont tendance à chauffer, surtout l'été.
Les autos ne s'éloignent guère des villes, les pannes étant fréquentes et les épiceries où se procurer de l'essence encore plus rare. que les mécaniciens.
On ne se fixe jamais une heure d'arrivée. D'ailleurs, une fois sur la route, on se trouve en plein inconnu; à part les petites plaques bleues des Ponts et Chaussées, rares et à peine visibles, aucun repère pour se guider.
(Alain Frerejean, Les Peugeot, deux siècles d'aventure, Flammarion, p. 87.)
mardi 14 octobre 2014
Journal du 14 octobre 1893
Oh! critique, je comprends très bien votre critique. Vous savez, entre nous, moi, je ne me plais pas toujours, non plus.
Actualité littéraire
Le chiffre de la semaine
30 ans
Le salon du livre et de la presse jeunesse célèbre sa 30e édition. Il se tiendra du 26 novembre au 1er décembre, à Montreuil. Avec plus de 160.000 visiteurs, c'est l'une des plus importantes manifestations littéraires.
(Le Figaro littéraire, jeudi 9 octobre 2014, p. 7.)
lundi 13 octobre 2014
Réédition de Poil de Carotte
Le Figaro du 8 octobre 1915 se réjouit de la réédition du chef-d'œuvre de Jules Renard, à un prix très raisonnable: 50 centimes.
«Ce délicieux roman, le chef-d'œuvre de Jules Renard, reparaît, aujourd'hui, en librairie. Il reparaît en un délicieux volume. Il reparaît sous une très jolie couverture illustrée en couleurs signée Albert Guillaume. Il reparait au prix infime et extraordinaire de cinquante centimes.
Oui, de cinquante centimes seulement. En effet, Poil de Carotte est republié par Select-Collection, cette collection de romans que l'éditeur Flammarion avait commencé à publier peu de temps avant la guerre et qui offre aux lecteurs à un prix invraisemblable tous les chefs-d'œuvre des maîtres du roman contemporain.
Au prix de cinquante centimes, Select-Collection avait déjà publié: Rose et Ninette et Tartarin de Tarascon d'Alphonse Daudet, Thérèse Raquin et Madeleine Férut d'Emile Zola, Madame André et Césarine de Jean Richepin, La Petite Dernière et Les Amours d'Estève d'André Theuriet, Les Vacances d'un jeune homme sage de Henri de Régnier, A table d'Henri Lavedan, […] et tant d'autres œuvres passionnantes, émouvantes ou souriantes. Select-Collection publie aujourd'hui Poil de Carotte.
N'est-ce pas un choix merveilleux? Et n'est-il pas particulièrement agréable de penser, en ce moment, que c'est grâce à des efforts de ce genre de l'édition française que les meilleures œuvres de nos plus grands écrivains peuvent être répandues partout à l'étranger, à des prix qui les mettent à la portée de toutes les bourses?...» écrit Le Figaro du 8 octobre 1915.
(le figaro.fr, 8 octobre 2014)
dimanche 12 octobre 2014
Journal du 12 octobre 1908
Il est bien difficile de résister à Guitry, mais grâce à Bourget, on y arrive. Il ne reçoit plus que les académiciens et les futurs académiciens.
L’Émigré, vraiment une très pauvre chose, d'un romancier qui ne comprend rien au théâtre ni, hélas, au progrès humain.
Un vieux spectateur applaudit à tout ce que disent les officiers. Tout ce que dit un officier est bien.
Dès qu'on le complimente, Guitry se met à raconter de petites histoires, avec des temps d'arrêt pour que le reste du compliment puisse se placer.
Une femme dort à L’Émigré. Allons! il y a encore des honnêtes femmes.
Les derniers marquis ne veulent pas désavouer tout à fait Bourget: ils envoient leurs larbins à L’Émigré.
- L'Égypte? dit Guitry. Des gens qui depuis quatre mille ans se foutent de nous.
samedi 11 octobre 2014
Journal du 11 octobre 1888
Il fit un poème et le commença ainsi:" Muse, ne me dis rien! Muse, tais-toi!"
vendredi 10 octobre 2014
Journal du 10 octobre 1895
Quand nous rencontrons une actrice, une femme de lettres, nous lui disons:" Ma femme est beaucoup moins intelligente que vous. Elle n'a ni votre esprit, ni votre beauté, ni vos toilettes, mais vous verrez comme elle est bonne femme! Elle sera si heureuse de vous connaître que je suis sûr qu'elle vous plaira." Et, si notre femme, surgissant derrière nous, nous entendait parler ainsi, elle nous donnerait peut-être une claque.
jeudi 9 octobre 2014
Journal du 9 octobre 1888
Reçu de mon père une lettre attristante. Rien sur Crime de village, pas un mot. Encore une vanité qu'il faudra que je perde.
Intermède
Du pont des arts, balcon de Paris
- Pourquoi, Seigneur, les hirondelles
Si bas, puis si haut volent-elles?
Qu'en savent-elles:?
Qu'en sais-je?
Rien.
Et moi, pourquoi gai, pourquoi morose,
Pourquoi mes vers, pourquoi ma prose,
Pourquoi sous mes doigts cette rose,
Qu'en sais-je?
Rien.
(Georges Faillet dit Fagus, Pas perdus, Le divan, Paris, 1924.)
mercredi 8 octobre 2014
Journal du 8 octobre 1900
Voyage. Le changement de figure du maître d'hôtel dès qu'il apprend qu'on a pas l'intention de passer sa vie chez lui.
Les hommes politiques au temps de Jules Renard
C'est un spectacle qui porte à rire - pour ne pas en pleurer - que celui de cet État, où le même homme politique, avocat borné et têtu, après avoir fait le malheur de son pays et l'avoir mené presque à la ruine, se trouve chargé de le relever, tout en le conduisant de nouveau, par son étroitesse d'esprit et son entêtement, à une autre aventure analogue à la première.
Je le disais à Dumur: "Partout ailleurs, le personnel gouvernemental a changé. Chez nous, le même est toujours là. Grave. " Il dut le reconnaître.
Les hommes sont rares à soixante ans qui savent s'adapter à des situations nouvelles. L'esprit est ossifié, tout progrès est impossible. On n'aurait pas du les laisser reparaître.
A situation nouvelle, homme nouveaux.
(Paul Léautaud, Choix de pages, notes retrouvées, Edition du Bélier)
mardi 7 octobre 2014
Journal du 7 octobre 1903
On l'entend crier derrière sa charrue: "Robinet! Robinet!" et se lamenter qu'avec un bœuf pareil il faut avoir une patience d'ange.
Jules Renard et la Tour Eiffel
A propos de la tour Eiffel:
Je la déteste. J'y vais déjeuner tous les jours, comme ça, je ne la vois pas.
(Jules Renard, cité par Philippe Bouvard, Le Figaro magazine, 25 juillet 2014, p. 98.)
Je la déteste. J'y vais déjeuner tous les jours, comme ça, je ne la vois pas.
(Jules Renard, cité par Philippe Bouvard, Le Figaro magazine, 25 juillet 2014, p. 98.)
lundi 6 octobre 2014
Journal du 6 octobre 1889
Ce que j'ai fait de plus utile jusqu'ici, c'est certainement d'avoir fait tourner des gros sous sur mon bureau pour amuser François.
Actualité renardienne
A partir du 7 octobre 2014, au théâtre Daunou, Paris 2°
Le plaisir de rompre et Le pain de ménage, de Jules Renard,
Mise en scène Pierre Laville, avec Béatrice Agenin et Laurent D'Olce
dimanche 5 octobre 2014
samedi 4 octobre 2014
Journal du 4 octobre 1887
Chaque matin, le vieux poète s'adosse au vieux rocher de l'inspiration, grimace, rougit, se raidit, se rompt les reins, et rien ne bouge.
vendredi 3 octobre 2014
Journal du 3 octobre 1895
Celui qui aime la littérature n'aime pas l'argent, ni les tableaux, ni les bibelots, ni le reste. Au fond, Balzac n'aimait pas la littérature.
Balzac est vrai en gros, il ne l'est pas en détail.
Les mines au temps de Jules Renard
Visite de Louis G... Il mes fait un tableau du sort des chevaux de mine, passant leur vie entière, dix-neuf ans ou plus, sous terre, à la lumière ou dans la nuit, ne remontant au jour que pour mourir, souvent couverts de blessures, aux oreilles, notamment, blessures qu'on raccommode le plus souvent avec du fil de fer. Ces chevaux, pourtant, doux, sensibles, intelligents, connaissant par coeur les détours de la mine, le temps de leur travail, jusqu'au nombre de bennes qui compose leur besogne quotidienne, refusant de continuer quand ce nombre est atteint, vivants là, êtres animés, dans une sorte de tombe.
Il me donne ce détail: quand de jeunes chevaux arrivent dans la mine, pour y trouver le même sort, les vieux viennent à eux, les examinent, les flairent, comme pour respirer sur eux l'odeur de l'air et du grand jour, s'attachent à eux, les suivent, les accompagnent, comme des anciens, qui mettent les bleus au courant.
G... me dit qu'on n'a jamais rien pu obtenir pour améliorer le sort de ces malheureuses bêtes. Lui qui a été mineur, qui a vu de près l'existence qui leur est faite, il a écrit un jour, dans un journal de la localité, un article révélant nombre de faits de cruauté. La Compagnie, intentant un procès à ce journal, a obtenu contre lui une condamnation à des dommages-intérêts élevés. Rares sont les mineurs qui s'attachent à un cheval ou à un autre, et lui apportent du dehors une petite gâterie, des carottes, par exemple. En général, des êtres extrêmement frustres, qui jugent leur propre sort pénible et misérable et partent de là pour juger que celui de ces bêtes ne compte pas.
Je détournais la tête pendant que G... parlait, tant j'avais de peine à retenir mes larmes.
(Paul Léautaud, Propos d'un jour, Mercure de France, 1947, p. 132.)
jeudi 2 octobre 2014
Journal du 2 octobre 1895
Ne vous illusionnez pas! Né vingt ans plus tôt, vous auriez fait du naturalisme comme tout le monde.
Actualité culturelle
La sortie au cinéma du Journal d'une femme de chambre, film tiré du roman d'Octave Mirbeau, est prévue au cours de l'année 2015.
Le tournage est en cours, réalisé par Benoît Jacquot. Initialement le rôle de Célestine devait être interprété par Marion Cotillard mais finalement c'est Léa Seydoux qui sera l’Interprète. Vincent Lindon sera celui de Georges Géret.
T.J.
mercredi 1 octobre 2014
Journal du 1er octobre 1906
Automne. La précoce vieillesse de certains arbres au milieu d'autres qui restent verts et qui semblent du même âge.
Poil de Carotte au cinéma
Soirs de Paris. La nouvelle incarnation de Poil de Carotte ou Jules Renard, auteur de film présenté par Tristan Bernard. Par Pierre Lazareff.
- A ta santé, grand serin!
- A ta santé "Monsieur Lepic".
Ah non! pardon... à ta santé papa.
- A ta santé, grand serin!
- A ta santé "Monsieur Lepic".
Ah non! pardon... à ta santé papa.
Dans les grands yeux de Poil de Carotte le bonheur se reflète pour la première fois, car pour la première fois il se sent aimé de son père.
C'est la dernière réplique, la dernière image du beau film tiré par Julien Duvivier du chef d’œuvre de Jules Renard.
Lumière... Tonnerre d’applaudissement. Pas une personne qui se précipite vers la sortie, vers le vestiaire. Les gens de l'orchestre sont debout tournés vers le premier étage.
C'était, vous l'avez compris, hier soir dans ce cinéma des Boulevards où la foule des privilégiés s'était rendue pour admirer une œuvre dont on disait, par avance, le plus grand bien, soit pour voir manger le dompteur.
Faire parler sur l'écran les héros de chair, de sang et de nerfs de Jules Renard, c'était une tâche délicate, dangereuse même pour le réalisateur, qui, avec David Golder, s'était mis au premier rang parmi ses pairs. Évidemment il avait déjà tiré de Poil de Carotte un film muet, mais c'était plus facile, n'est-ce pas?
L'évènement avait attiré un public élégant et choisi, dans sa diversité... Tout de suite on remarque beaucoup d'écrivains: Mr J.-H. Rosny aîné, président de l'Académie Goncourt, dont Renard fut membre, Henri de Régnier qui représentait l'autre académie; encore un des "dix", Gaston Chéreau et puis Pierre et Alice La Mauzière; José Germain; Emmanuel Bourdier, André Foucault et Romain Coolus, et puis encore...[...]
(Pierre Lazareff, Paris-Midi, 5 novembre 1932).