Je regarde Fantec. Il a près de dix ans. Il en aura quinze que je n'en aurai pas quarante, et il n'y a presque rien de commun entre nous.
Et je ne tiens ni à ce qu'il lise mes livres, ni à ce qu'il m'admire.
Je ne peux lui être utile que d'une façon indirecte, c'est-à-dire qu'il faudra que je gagne beaucoup d'argent pour qu'il fasse ses études, puis l'homme qu'il voudra.
Je ne me sens que deux ou trois devoirs envers lui, et qui sont en contradiction avec ma nature développée. Il faut que je sois un honnête papa dont le nom, du point de vue social, ne soit pas une étiquette ridicule, et qu'au besoin je fasse de mauvaises pièces de théâtre qui me permettent de l'élever. Le reste ne le regarde pas. Et il peut rire des petites trouvailles de l'auteur des Histoires naturelles; et il ne m’intéresse, comme le reste de l'univers, que pour ce que j'en pourrai tirer de littérature.
J'ai peut-être aussi le devoir, qui m'est plus facile, de rendre sa mère heureuse afin qu'il soit heureux par elle.
Ainsi n'avons-nous que des rapports indirects. Cela m'étonne et me désole un peu au moment où j'écris ces lignes, mais sans doute n'y penserai-je plus ce soir.
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