C’est après avoir traversé
une plaine brûlée du soleil que je les rencontre. Ils ne demeurent pas au bord de la route à cause du bruit.
Ils habitent les champs
incultes, sur une source connue des oiseaux seuls.
De loin ils semblent
impénétrables.
Dès que j’approche, leurs troncs se desserrent.
Dès que j’approche, leurs troncs se desserrent.
Ils m’accueillent avec
prudence. Je peux me reposer, me rafraîchir, mais je devine qu’ils m’observent
et se défient.
Ils vivent en famille, les
plus âgés au milieu, et les petits, ceux dont les premières feuilles viennent
de naître, un peu partout, sans jamais s’écarter.
Ils mettent longtemps à
mourir, et ils gardent les morts debout jusqu’à la chute en poussière.
Ils se flattent de leurs
longues branches, pour s’assurer qu’ils sont tous là, comme les aveugles.
Ils gesticulent de colère, si le vent s’essouffle à les déraciner. Mais entre eux aucune dispute. Ils ne murmurent que d’accord.
Ils gesticulent de colère, si le vent s’essouffle à les déraciner. Mais entre eux aucune dispute. Ils ne murmurent que d’accord.
Je sens qu’ils doivent être
ma vraie famille. J’oublierai vite l’autre. Ces arbres m’adopteront peu à peu, et pour le mériter, j’apprends ce qu’il faut savoir :
Je sais déjà regarder les
nuages qui passent.
Je sais aussi rester en
place.
Et je sais presque me taire.
(Jules Renard, Histoires naturelles)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
En publiant un commentaire sur JulesRenard.fr, vous vous engagez à rester courtois. Tout le monde peut commenter (Les commentaires sont publiés après modération).