La Vérité a disparu avec la Science. Il demeure des sciences et des vérités. Il faut avouer que ce pluralisme reste, chez Renard, bien fragile, puisqu'il admet en même temps le déterminisme. Le véritable pluralisme ne peut se fonder que sur une indétermination partielle de l'univers et sur la liberté de l'homme. Mais Renard n'allait pas chercher si loin.
Ni Anatole France, qui écrivait dans La Vie littéraire en 1891 (la phrase de Renard citée plus haut est de 1892): "... On a dit qu'il y avait des cerveaux à cloisons étanches. Le fluide le plus subtil qui remplit un des compartiments ne pénètre point les autres." Et comme un rationaliste ardent s'étonnait devant M. Théodule Ribot qu'il y eût des têtes bien faites, le maitre de la philosophie expérimentale lui répondit avec un doux sourire: - "Rien n'est moins fait pour surprendre. N'est-ce pas, au contraire, une conception bien spiritualiste que celle qui veut établir l'unité dans une intelligence humaine? Pourquoi ne voulez-vous pas qu'un homme soit double, triple, quadruple?"
Cette page est précieuse en sa sottise, parce qu'elle nous montre que le pluralisme expérimental était expressément dirigé contre le rationalisme spiritualiste. Tout ce courant pessimiste devait aboutir aux Désharmonies de la nature humaine de Metchnikoff. Et c'est bien une étude des "Désharmonies de la Nature" que Renard souhaite entreprendre. Ainsi fournira-t-il une justification théorique de son goût exclusif pour les instantanés:
"En morceaux, s'écrie-t-il, en petits morceaux, en tout petits morceaux.
A suivre.
Jean-Paul Sartre, Situation I, Gallimard, 1947)
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